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De la Chine au Nigeria, de l'escorting au tourisme sexuel... : les bonnes feuilles du Rapport mondial

 

Nous vous proposons, en exclusivité, des extraits du Rapport mondial sur l'exploitation sexuelle. Quelques pages ne peuvent évidemment pas rendre compte de l'ouvrage. Mais elles montrent la diversité des analyses et nous ne pouvons que vous inviter à lire la suite....

«CHINE

Synthétiser l'actualité de la prostitution en Chine en 2010, sans s'exposer à une simplification forcément réductrice des tendances et des événements, est un pari risqué. Comme partout, la prostitution y est protéiforme. La différence essentielle tient dans les proportions. Tout y est PLUS qu'ailleurs. L'ensemble des éditorialistes s'accordent sur le fait que le sujet de la prostitution a été fortement traité dans les médias en 2010. Les articles qui l'évoquent arrivent très souvent en tête des lectures sur internet.

Après avoir pris conscience de l'ampleur du phénomène et de ses enjeux à la fin des années 80, les autorités chinoises ont officiellement « déclaré la guerre » à la prostitution. Avant les Jeux olympiques de 2008, de vastes opérations de « nettoyage » avaient eu lieu à Pékin. Sans structures d'accueil et moyens de réinsertion, sans perspectives, les jeunes femmes sont revenues et l'industrie du sexe a continué à prospérer. L'Exposition Universelle de 2010 à Shanghai, les critiques étrangères sur la manière de gérer le problème de la traite des êtres humains, la croissance rampante de la criminalité (jeux clandestins, drogue et prostitution) et les problèmes sociaux (manifestations, sida) ont conduit les autorités à relancer des opérations de « nettoyage » contre la prostitution dans une trentaine de grandes métropoles du pays.

Plus spectaculaires qu'efficaces à long terme et très critiquées pour le traitement réservé aux personnes prostituées, ces opérations d'envergure ont suscité un véritable débat chez les chercheurs et les blogueurs influents du pays. Loin d'apparaître complètement figé, le Parti Communiste Chinois, sans renier le bien-fondé de son action, étudie aujourd'hui d'autres pistes que la seule répression. Mais les écarts restent grands entre ce qui est décidé en hauts lieux et les autorités locales où la corruption est forte. Les officiels impliqués plus ou moins directement dans des affaires de prostitution sont nombreux. Les perspectives démographiques qui montrent un fort déficit du nombre de femmes par rapport aux hommes n'amènent pas non plus les autorités à espérer un recul rapide de la prostitution, de la traite des êtres humains et des activités criminelles qui les accompagnent. Toutefois, elles n'envisagent pas de relâcher leur étreinte répressive (...) »

 

« escorting

L'année de référence a mis particulièrement en lumière le phénomène dit de « l'escorting », qui peut, à défaut d'avoir une définition juridique ou sociologique précise, être présenté comme une forme émergente de prostitution, essentiellement sur internet.

On peut se référer à la thèse de doctorat en sciences sociales de Laurent Mélito sur les pratiques de l'escorting pour mieux cerner une activité que l'actualité, comme l'affaire dite des joueurs de l'équipe de France de football ou celle relative aux soirées de Silvio Berlusconi, a largement popularisé en 2010.

La généralisation d'internet dans les relations sociales a conduit à observer la naissance d'une nouvelle forme de prostitution dont les acteurs, et ceux qui en profitent, s'efforcent de montrer la différence avec les pratiques plus « classiques » permettant de recourir à des services sexuels tarifés.

L'escorting a d'abord tout fait pour se distinguer de la prostitution de rue en mettant l'accent sur la notion de « luxe », de sécurité. Son succès a été largement favorisé par les capacités de diffusion qu'offre internet et l'illusion de l'anonymat qui l'accompagne. Les multiples illustrations du phénomène témoignent de l'accent mis dans un effort manifeste de marketing pour banaliser le recours au sexe payant.

2010 aura ainsi, au moins dans la terminologie des médias, consacré le triomphe de l'escorting sur la notion, décidément obsolète de « call girl » qui avait pourtant, dans les années 70 et 80, alimenté la chronique du monde de la prostitution « présentable » d'avant l'ère internet.

Le point commun aux situations d'escorting apparues en 2010 reste la volonté de valoriser la relation supposée entre client et personne prostituée, en suggérant à la fois l'autonomie de la personne que l'on paye, ce qui est propice à favoriser la bonne conscience du client, et l'existence d'un libre contrat entre deux personnes qui négocient, sans affect excessif, une prestation librement consentie, dont les tarifs élevés démontrent la qualité.

Cette image « glamour » véhiculée par la publicité envahissante sur internet suggère que la prostitution est bien un métier comme un autre où fournisseur et client peuvent trouver une satisfaction légitime, bien éloignée du quotidien souvent sordide de la prostitution traditionnelle.

Pourtant, un retour sur l'actualité de l'année 2010 montre que, derrière les apparences, l'escorting renvoie implacablement aux réalités de l'exploitation sexuelle et, la plupart du temps, à la présence de réseaux criminels dont la recherche de profits reste le moteur principal.

La place des « escorts » dans le traitement médiatique de la prostitution a été d'autant plus abondant qu'au-delà des revues ou des sites spécialisés dans les recherches de partenaires sexuels, les médias plus traditionnels, dont la cible est le grand public ou simplement des personnes intéressées par les problèmes de société, y trouvent l'occasion d'un traitement « décomplexé » d'un sujet qui peut être vite scabreux.

Le traitement du phénomène de l'escorting dans les médias de 2010 est en effet partagé entre le compte-rendu de faits divers à chaque démantèlement de réseaux significatifs de trafiquants, mais davantage encore sous l'angle de l'analyse de comportements plus dérangeants, car s'éloignant des clichés de la prostitution  « classique », au premier rang desquels la prostitution étudiante (...) ».

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