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L'Europe mieux armée pour lutter contre les trafics humains

Une assistance renforcée des victimes, des peines plus sévères pour les trafiquants.... Ce sont quelques-unes des avancées de la nouvelle législation sur la traite des êtres humains adoptée par le Parlement européen le 14 décembre 2010.

« L'accord obtenu est bien meilleur que ce que j'avais espéré », se réjouissait en décembre dernier la députée européenne Anna Hedh, rapporteur, avec Edit Bauer, d'une proposition de directive sur la traite des êtres humains. En effet, après plusieurs mois de discussions, le Parlement européen vient d'approuver de nouvelles règles pour mieux combattre le phénomène. Ces règles qui entreront en vigueur en 2012, viendront remplacer la directive-cadre de 2002, déjà dépassée par l'ampleur du phénomène. 

Ce sont aujourd'hui des milliers de personnes qui, chaque année, sont victimes de traite des êtres humains dans l'Union européenne. 80% d'entre elles sont des femmes. Et si une large partie des victimes est destinée à la prostitution (43% d'entre elles selon les estimations du Parlement européen, mais 79% selon l'UNODC), il ne faut pas oublier que ce n'est pas la seule forme d'exploitation. La mendicité forcée, le mariage forcé, le travail forcé, la servitude domestique, l'adoption illégale, le trafic d'organes font aussi partie des activités déployées par les réseaux criminels.

« Les négociations ont été difficiles mais nous estimons que nous avons obtenu de bons résultats et atteint les points les plus important pour le Parlement. Avec cette proposition, nous allons créer un environnement plus difficile pour les trafiquants d'êtres humains et une meilleure protection pour les victimes », commentait encore Madame Hedh. De fait, trois thèmes ont été privilégiés : la définition des différentes formes de traite, les poursuites à l'encontre des responsables de la traite des êtres humains, la protection des victimes. 


Une lutte implacable contre les trafiquants

La présente directive adopte une conception de la traite plus large que celle évoquée dans le texte de 2002 et mieux adaptée aux besoins actuels. De nouvelles formes d'exploitation sont prises en compte : « mendicité forcée », la traite des êtres humains « à des fins de prélèvement d'organes », ainsi que «d'autres comportements tels que l'adoption illégale ou les mariages forcés, dans la mesure où les critères constitutifs de la traite des êtres humains sont réunis ». 

A partir de cette base élargie, la nouvelle directive définit, pour l'ensemble des pays européens, les peines prévues pour les trafiquants : au moins cinq ans d'emprisonnement, voire dix ans en cas de circonstances aggravantes, c'est-à-dire « lorsque l'infraction a été commise dans certaines circonstances, par exemple, à l'encontre d'une victime particulièrement vulnérable (...). Dans le contexte de la présente directive, le vocable « personnes particulièrement vulnérables » devrait désigner au minimum tous les enfants ».

Il est par ailleurs prescrit aux Etats membres de veiller à ce que les produits tirés des trafics soient saisis et confisqués. Les Etats sont également « encouragés » à utiliser ces fonds au financement de « l'aide aux victimes et la protection de celles-ci, et notamment leur indemnisation ». 

 
Une aide renforcée aux victimes

Dès lors qu'une personne est susceptible d'avoir été victime de traite, elle doit pouvoir bénéficier d'aide et d'assistance. La nature de l'aide apportée aux victimes est non seulement matérielle, mais leur permet également de se loger, d'avoir accès à des soins médicaux, de bénéficier d'une assistance psychologique, d'une assistance juridique, de conseils, d'informations, de traduction... Une protection spécifique est également assurée pour les enfants victimes.

Cette protection sera fournie « avant, pendant et - durant une période suffisante - après la clôture de la procédure pénale ». Et cette aide apportée à la victime ne sera pas « subordonnée à sa volonté de coopérer dans le cadre de l'enquête, des poursuites et du procès pénaux ».


Et le client de la prostitution ? 

On le voit, cette directive représente un réel progrès par rapport à la décision cadre de 2002. Seul un aspect important a été négligé : le client de la prostitution. En janvier 2010, la députée Anna Hehd déclarait vouloir « promouvoir le modèle suédois qui punit les clients. C'est un sujet délicat, ajoutait-elle, mais la Suède a moins de problèmes avec le trafic d'êtres humains que le reste de l'Union européenne. ». 

C'était un voeu pieux ! Car, contrairement à ce que Madame Hehd souhaitait, contrairement à ce que prévoyait le projet de loi discuté, aucune mesure contraignante n'a été prise dans ce sens. Le texte se contente de recommander aux Etats membres d' «envisager d'adopter les mesures nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale au fait d'utiliser » les services d'une victime. 

Nous sommes en effet bien loin du modèle suédois ! Or, comme le rappelait Madame Hehd : « S'il n'y avait pas de la demande, il n'y aurait pas de problème ». C'est par le biais de la dissuasion de la demande qu'une lutte contre les réseaux pourra être efficacement menée.

 

CG

fight against human trafficking : le site de la Commission européenne
nouvelle législation sur la traite adoptée le 14 décembre 2010
 

Définitions : On désigne par traite des êtres humains « le recrutement, le transport, l'hébergement ou l'accueil de personnes, par la menace ou le recours à la force ou à d'autres formes de contrainte., par enlèvement, fraude, tromperie, abus d'autorité ou d'une situation de vulnérabilité ou par l'offre ou l'acceptation de paiements ou d'avantages pour obtenir le consentement d'une personne ayant autorité sur une autre aux fins d'exploitation » (travail forcé, prélèvement d'organes, exploitation sexuelle, esclavage domestique...).
Il ne faut pas confondre immigration clandestine et traite des êtres humains. Le trafic illicite de migrants relève d'une démarche personnelle et volontaire, alors que la victime de traite est rarement consentante, ou, si elle l'est, son consentement est obtenu par la contrainte ou la tromperie.

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